Dans notre dernière publication, nous avons vu comment le communiqué de presse et la gestion de crise avaient vu le jour sous l’impulsion d‘Ivy Lee, dans le but d’améliorer les relations entre les entreprises, l’opinion publique et la presse. Cela a permis à celles-ci de faire preuve de davantage de transparence au regard de certains faits. Aujourd’hui, pour notre deuxième article consacré aux pères fondateurs des relations publiques, nous abordons le cas d’Edward Bernays, considéré par de nombreux communicants comme le père de la « propagande moderne ».

 

Edward Bernays : « La manipulation consciente, intelligente, des opinions et des habitudes organisées des masses joue un rôle important dans une société démocratique. »

Si le nom d’Ivy Lee n’est connu que d’un cercle restreint de communicants, celui d’Edward Bernays a su traverser les époques et il est considéré comme le père légitime des relations publiques. Neveu de Sigmund Freud, il commence sa carrière dans les années 1920, une époque où la société américaine commence à devenir une société de consommation. Désireuses de se distinguer des leurs concurrents et d’inciter leurs potentiels clients à acheter, les entreprises montrent un vif intérêt pour la communication.

Grâce à sa maîtrise de techniques de vente redoutables, Edward a l’idée d’associer un produit à une idée ou à des valeurs. Pour ne citer que deux exemples, il a relancé les ventes de bacon aux États-Unis en en faisant le symbole du petit-déjeuner américain. Pour appuyer son propos, Il fait appel à des médecins, ces derniers faisant figures d’autorité, pour qu’ils louent les bienfaits du bacon au sein de la presse. Il a également réussi à associer l’émancipation des femmes et le fait de fumer des cigarettes : pour cela, il a réuni la presse autour d’un évènement organisé par l’entreprise Tobacco Company où des femmes ont défilé dans la rue en fumant des cigarettes de la marque.

Les relations publiques sont alors utilisées pour créer de nouvelles habitudes de consommation et reposent sur des campagnes de communication tendant à faire consommer un produit. Il est indubitable que Bernays ne fait aucune distinction entre la publicité et les relations publiques. D’ailleurs, dans ses livres Public Relations et Propaganda, il est le premier à utiliser les termes « public relation » pour remplacer celui de propagande. Selon lui, le conseiller en relations publiques joue un rôle de médiateur entre les entreprises et le public. Son rôle est d’expliquer les attentes et les visions des deux parties. Il va jusqu’à dire que le conseiller est un professionnel de la démocratie puisque le public souhaite être guidé dans ses choix et les hommes de pouvoir veulent en apprendre davantage sur les phénomènes de masse. Cette « nouvelle propagande » est le meilleur moyen de satisfaire les deux parties.

Bien que le terme de « propagande » soit très controversé, il permet à Bernays de ne pas distinguer l’information de la communication, ce que défend aujourd’hui tout théoricien contemporain des relations publiques. En voyant la propagande comme un moyen de faire accepter des vérités, il reste dans la lignée d’Ivy Lee sur le principe que les entreprises doivent faire preuve de davantage de transparence. Pour lui, la nouvelle propagande n’est pas un mal en soi du fait qu’elle ne trompe personne. Il y a seulement des vérités que chaque partie prenante peut tourner à son avantage. Cette nuance le différencie de son prédécesseur dans la mesure où il admet que l’entreprise et la personne à laquelle celle-ci s’adresse ont des besoins différents et spécifiques. De ce fait, la presse doit servir d’intermédiaire entre les deux parties pour développer une vision commune.

Dans notre prochain et dernier blogpost de cette série, nous verrons comment les relations publiques se sont peu à peu institutionnalisées à travers le travail de Lucien Matrat.

 

Biographie :

Née en 1893 à Vienne, Edward Bernays est un publicitaire austro-américain. Après avoir était le co-rédacteur d’une revue de médecine tout en faisant des études d’agricultures, il part aux Etats-Unis pour devenir l’attaché de presse du ténor Enrico Caruso. Après la première guerre mondiale, il lance son agence de relations publiques avec sa femme, Doris Fleischman. Au cours de sa carrière, il a conseillé des entreprises telles que Tobacco Strike, ou encore United Fruit. Il s’est éteint en 1995 à Cambridge.

 

Maëlys Trassaert