Dix ans auparavant, les blogueurs et blogueuses régnaient sur l’influence. Aujourd’hui, ce sont plutôt les Instagrameurs, les Youtubeurs et autres Tiktokeurs qui en sont les maîtres. Une question se pose alors : le blog, est-il bon pour les oubliettes ?

Je me suis entretenue avec Aurélie Romand, cofondatrice du blog culturel Mon Cher Watson (mais pas que), qui compte bien rendre au blog ses lettres de noblesse.

Bonjour Aurélie et merci d’avance pour le temps que vous me consacrez aujourd’hui. Tout d’abord, pourriez-vous vous présenter, ainsi que votre blog ?

Bonjour Alexandra ! J’ai commencé ma carrière de communicante à la fin des années 2000 comme attachée de presse. C’était une époque où l’on commençait tout juste à voir la presse sur le web et le marketing d’influence n’existait pas encore. Quant aux blogs, ils ressemblaient davantage aux journaux intimes des adolescents (hello les Skyblogs !).

En 2016, j’ai quitté le monde des agences de relations presse pour me consacrer, avec une amie, à la création d’une entreprise dans le secteur culturel. En parallèle, nous avons créé le blog « Mon Cher Watson ». À travers celui-ci, nous réalisons des interviews des professionnels de la culture pour partager et valoriser leurs métiers, leurs projets culturels, mais aussi parler des enjeux actuels du monde de la culture. Notre cible principale est donc très B2B : nous nous adressons aux professionnels du secteur et aux étudiants. Étonnamment, nous observons également qu’une part de notre audience provient du grand public, qui aime en savoir plus sur les coulisses de la culture. Depuis 2020, nous sommes épaulées par une équipe de contributrices externes très dynamiques !

Aujourd’hui, je suis consultante en stratégie de communication et coordinatrice d’actions de médiations scientifiques. Je suis aussi formatrice et chargée de cours à l’Université Lumière Lyon 2.

Quelle est votre vision des blogueurs ?

Pour moi, il existe actuellement deux types de blogs : ceux où les rédacteurs et rédactrices s’expriment de manière personnelle sur des sujets qui leur tiennent à cœur, et une catégorie plus professionnelle. Ces derniers réalisent un vrai travail de création de contenu pour apporter des conseils, donner des idées, tester des produits, etc.

En matière de communication et de marketing d’influence, nous nous tournons davantage vers cette typologie de blogueurs. Elle s’est largement professionnalisée ces dix  dernières années et leur travail se rapproche parfois du métier de journaliste web, avec une excellente maîtrise de l’écriture web et du SEO par exemple.

Quelle stratégie avez-vous adoptée pour Mon Cher Watson sur les réseaux sociaux ?

Depuis sa création, Mon Cher Watson est présent sur Facebook, Twitter et LinkedIn.

Si beaucoup parlent du déclin de Facebook, une très grande majorité de Français ont un compte sur ce réseau, y compris les plus jeunes qui l’utilisent davantage comme un moyen de se tenir informés sur certains événements. Quant à Twitter et LinkedIn, nous nous devions évidemment d’y être, étant donné les secteurs dans lesquels nous évoluons.

Le cœur de la création d’articles se fait sur Mon Cher Watson. C’est le travail que nous privilégions en premier lieu. Une fois ces derniers publiés sur le site, nous partageons les liens sur les trois réseaux, avec un post en début de semaine du type : « Voilà la nouvelle enquête de la semaine. » Dans les jours ou les semaines qui suivent, nous publions à nouveau sur les réseaux avec la mise en avant d’une citation forte cette fois.

Aujourd’hui, quel équilibre avez-vous trouvé  entre le blog et les réseaux ?

Durant les premières années d’existence de notre blog, les réseaux sociaux nous ont permis de gagner en visibilité. Sans eux, nous aurions eu très peu de visiteurs . Je pense que c’est (très) difficile de monter un projet éditorial de toute pièce sans la force et la visibilité offerte par les réseaux sociaux. Aujourd’hui, Mon Cher Watson bénéficie d’une belle notoriété dans le milieu culturel B2B. Nos lecteurs ainsi que nos réseaux professionnels nous connaissent bien. Nous avons mis en place des partenariats sur le long terme, notamment avec le ministère de la Culture. Nous avons suffisamment de contenu de qualité pour apparaître dans les moteurs de recherche. Notre SEO fonctionne bien – nous observons d’ailleurs une part grandissante d’entrées via les recherches sur Google. En 2020, nous avons enregistré 40 000 visiteurs uniques, ce qui demeure notre meilleure audience jusqu’à présent.

Aujourd’hui, nos lecteurs nous connaissent et reviennent régulièrement sur le site. Toutefois, certains d’entre eux nous ont fait savoir qu’il était difficile d’être informé de la parution de nouveaux articles. Il est vrai que les algorithmes des réseaux ne nous facilitent pas la tâche… Nous avons donc mis en place une newsletter. L’objectif est que nos abonnés et nos lecteurs reçoivent les nouvelles enquêtes directement dans leur boîte mail, et ce, sans intermédiaire, ni restrictions à cause des algorithmes. Cette technique marche plutôt bien, puisque nous enregistrons un taux d’ouverture entre 30 et 40 %. C’est un bon moyen de fidéliser nos lecteurs.

En définitive, il y a une réelle ambivalence sur les réseaux sociaux : s’ils offrent la possibilité de gagner en visibilité et de toucher de nouveaux publics, les algorithmes sur lesquels ils reposent ne permettent pas toujours d’informer nos fidèles lecteurs de nos nouvelles enquêtes.

Propos recueillis par Alexandra Corbelli